Le Grand Délitement de l'Occident Chrétien
Un ami, un peu malin en affaires, m'avait dit un jour (il y a de cela très longtemps) "chaque matin un Pigeon se lève quelque part". Petite phrase d'apparence anodine, mais frappée au coin du bon-sens. Ça m'a marqué tellement cette expression, que ça m'en travaille encore...
Pour vous, je ne sais pas. Mais moi, j'ai l'impression que depuis pas mal de temps déjà, allez au hasard, disons cinq années, nous vivons tous la trame d'un mauvais roman. Un roman à la mode, un de ces best-sellers venus d'Amérique, un de ceux qui exploitent les bons vieux réflexes salivaires, avec de bonnes vieilles recettes et grosses ficelles qui marchent du feu de Dieu. Des histoires paranoïaques, de Complots Séculaires, des Sagas d'Élus, de Malédictions, d'Envahisseurs venus de l'Étranger... des récits romanesques, un rien paranoïdes, qui commenceraient ainsi...
"À la seconde même où je sus que N.S. avait gagné la partie, j'eus comme un écoeurement, une sensation d'amertume dans la bouche, comme un mauvais présage. Un indicible et presque surnaturel présage de délitement futur et progressif. On venait de faire bouger les lignes en élisant ce type, quelque chose comme déstabiliser, brouiller les pistes, fausser tous les repères. Ce "on" englobait toute la droite, la droite dite modérée et la droite dite extrême, mais pas seulement, également des gens sensés. Des gens totalement égarés par la grâce, de discours, de promesses, de gesticulations scientifiquement calibrées par des hommes de l'ombre, des conseillers infiltrés de partout et n'ayant qu'un seul but : brouiller les cartes. Tout cela au profit du Grand Délitement."
Hé bien voilà le terme le mieux adapté... Délitement, avec un "D" majuscule. Et ces nigauds, ces crétins d'électeurs, y avaient crû. Et pas seulement ceux que l'on nomme les indécis. Vous je ne sais pas, mais moi dès qu'un journaliste parle d'indécis, invariablement, j'entends imbéci...
Le fameux Pigeon... Nous y revoilà !
Et par qui avait-il été élu avec le plus d'enthousiasme, le Petit NS ? Pas que par l'habituel électorat que l'on dit "réactionnaire", mais aussi par des gogos, des branchés post-modernes, de ceux qui se prennent tous pour des stars. Ils y avaient crû, précisément comme des branchés post-modernes avec un gros égo de Star. Et surtout, bien plus malins que tout... Car le branché post-moderne en est persuadé, lui, le seul être capable de regarder tout-à-la-fois le Foot et le Film de Cul dans la même soirée. Capable de zapper comme un forcené entre Canal+ et TF1. Capable de se dire branché et voter pour un type qui va tout foutre en l'air. Tout ce pour quoi ses propres parents se sont battus. Des générations entières se faisant taper sur le crâne à coups de matraques pour lui assurer une retraîte, et, pour certains, passer au peloton d'exécution...
C'est que le branché post-moderne est un publivore. Et donc un "malin". Un petit fûté qui sait se sortir des vieilles ornières. Des vieilles dualités, des notions "périmées" comme celles qu'on appelait autrefois la Droite et la Gauche. Autant dire au temps des Croisades (oui, ses notions d'Histoire sont des réminiscences assez floues de CM2). Et question gauche et droite, lui-même est intimement persuadé d'être un Mutant. Un mutant ne sachantt être que ambidextre, un mot de vocabulaire inconnu de lui jusqu'au jour ou l'aide à la frappe de son smartphone le lui a proposé. Il était en train de taper les trois premières lettres du mot "ambulance" dans un SMS, alors que sa femme était sur le point d'accoucher...
J'en aurais pleuré. Et j'ai effectivement pleuré. D'apprendre que parmi ceux-là, certains m'étaient plutôt proches. Des gens que je croyais sensés, que je n'aurais jamais soupçonnés. Ils avaient finalement voté pour ce type au nom de leur branchitude post-moderniste. Comme on aurait choisi sa marque de lessive après avoir comparé au vingt heure de TF1, entre le baril estampillé NS et celui marqué SR. Et voilà ce vers quoi on nous avait menés après deux millénaires. "On", étant ce petite monde factice de la Com et de la Pub réunies. Le petit monde des attachés de Presse. Celui des journalistes/animateurs de Télévision qui connaissent parfaitement leur métier. Je sais, je critique, je critique... Et comme un type pas branché du tout. Mais un type qui s'en tape. Un anachorète à beaucoup d'égards, et qui sera toujours de la Vieille École Humaniste. Qui dans des siècles encore sera taxé de Gaucho-Bobo-post-soixante-huitard. Tout ce que vomit le petit Nico de Neuilly et la famille de ce Vieux Borgne, à laquelle je lui rends bien. La différence, étant que cette famille "protestataire" est quasi-milliardaire. Elle couche dans des châteaux quand moi, le Bobo, je pointe tous les Dimanche dans des lieux non chauffés remplis de courants d'air...
On venait d'opter pour un baril de NS avec, à l'intérieur, de vrais petits morceaux de vraie politique de riches, à destination des riches, faite par des riches. Oubliée, la bonne vieille Charité de l'Occident Chrétien. Celle des bonnes vieilles familles bourgeoises où l'enseignement du curé a toujours valu plus largement celui de l'instituteur. Sauf que chez eux c'est souvent la même personne. Et que l'école s'appelle souvent Ste Clotilde, ne confondons pas tout... Et même si cet esprit charitable n'a jamais été pour eux qu'un mythe commode, un paravent à l'usage du Peuple, et dans l'entre-soi, pour s'auto-persuader d'être restés en droite ligne des enseignements du Nazaréen.
Le seul Métèque qu'ils supportent, à la rigueur... D'autant qu'ils ne risquent pas de me redescendre de là où l'on m'a cloué…
Alors le Grand Délitement nous gagne? Oui c'est bien ça. Oui, le Grand Délitement est là !
signé: J.C de N.